Le conflit homme-nature dans Kamikaze

Complexe et recherchée, l’histoire de Kamikaze fait appel à des thèmes classiques du manga et de l’animation japonaise. En effet, le scénario se base sur une « vengeance » de la nature contre les humains.

La déchéance de l’humanité

Pour justifier le soulèvement de la nature contre l’humanité, Satoshi Shiki met en avant une perte de conscience chez les hommes à travers différents personnages d’humains « normaux », qui sont autant de manifestations de cette civilisation humaine égoïste et pleine de vices.

Dès la deuxième scène du premier volume, on en a une belle illustration, avec de jeunes adultes, sans aucune considération pour les autres et obnubilés par leur plaisir personnel et immédiat. Autre exemple frappant dans le premier volume, c’est le comportement de Keiko Mase lorsqu’elle regarde l’enregistrement de l’explosion dans le métro. Ignorant toute compassion pour les victimes et leurs proches, elle ne pense qu’à « son » scoop, celui qui pourrait assurer sa réussite. Par son attitude, Keiko illustre ce monde dans lequel l’argent et la réussite priment trop souvent sur les sentiments.

Dans Kamikaze, même le gouvernement japonais n’est pas exempt de tout reproche. Ainsi, dirigée par le Premier ministre du Japon, la « commission spéciale des affaires liées aux gens du peuple de Kegaï« n’a pas pour but de protéger les habitants du Japon contre les monstres. Au contraire, elle aide les Kegaïnotami du feu et du vent à réveiller les monstres, afin de s’en servir comme sujets de recherche pour créer de nouvelles armes surpuissantes.

Cependant, l’illustration la plus cruelle et la plus triste de cette humanité égoïste et corrompue est l’attitude des parents adoptifs de Kikunosuke. Derrière une amabilité de façade, ceux-ci le rejetaient et parlaient même de l’abandonner et de le tuer. Leur hypocrisie et leur intolérance face à sa différence (l’enfant présentant une difformité à la main droite) ont engendré chez Kikunosuke un sentiment général de haine à l’égard des hommes.

Ces différents exemples appuient et justifient la légende des tribus du feu et du vent. En effet, d’après celle-ci, les quatre-vingt-huit fauves doivent détruire le monde actuel pour laisser la place à un nouveau monde, purifié des péchés de l’ancien.

N’allez pourtant pas croire que tout est négatif chez les humains de Satoshi Shiki. Des personnages comme Keiko, la mère adoptive de Misao Mikogami ou ce père cherchant à tout prix à protéger sa fille dans le volume 3 sont de beaux exemples de valeurs positives. Mais il faut reconnaître que, de manière générale, les personnages les plus humains de Kamikaze ne sont autres que les Kegaïnotami eux-mêmes. Ce n’est pas illogique, puisque ce sont eux les héros du manga, ceux que Satoshi Shiki met en avant et ceux auxquels le lecteur va s’attacher.

La vengeance de la nature

A vouloir toujours plus de progrès et de confort, les hommes mettent en péril la Terre qui leur a été confiée. Face à ce fléau, la légende des tribus du feu et du vent désigne les quatre-vingt-huit fauves comme une manifestation de la voix de la nature et un châtiment pour les humains dont les préoccupations se sont largement éloignées de leur planète. Ils sont là pour détruire l’homme et laver la Terre de son œuvre, afin que la nature reprenne ses droits.

L’apparition des cinq hommes de Kegaï et des monstres traduirait la volonté de la nature de s’opposer aux traitements que lui inflige l’humanité, ou plutôt de lui faire passer un message. Effectivement, une chance est accordée aux hommes avec la présence de ces hommes de Kegaï, aptes à lutter contre les monstres.

La première intervention des monstres il y a mille ans n’était peut-être qu’un avertissement pour les hommes. En effet, les monstres ont été facilement vaincus par les cinq hommes de Kegaï. Mais les hommes n’ont, semble-t-il, pas compris le message. Bien au contraire, ils ont persévéré et contribué à dégrader encore plus notre bonne vieille planète. D’où un recommencement de l’histoire avec le retour des quatre-vingt-huit fauves.

Cependant, aujourd’hui, le danger est tout autre et l’issue du conflit paraît incertaine. En effet, les chefs des tribus de Kegaï ne sont plus que deux à lutter pour préserver l’humanité : Kamuro pour la tribu de la Terre et Misao pour la tribu de l’eau. Les autres chefs se sont rangés du côté des quatre-vingt-huit fauves. L’humanité aura-t-elle droit à une troisième chance ou est-ce que la roue a définitivement tourné ? Les humains ont-ils été trop loin ou peuvent-ils encore faire marche arrière ? Là est tout l’enjeu de Kamikaze.

Le conflit nature/modernité est un thème récurrent dans les mangas et dessins animés japonais. Citons pour exemple Princesse Mononoke d’Hayao Miyazaki.

La divergence des croyances

L’histoire de Kamikaze se base sur une différence de croyances qui aboutit à un conflit entre les différents peuples de Kegaï. Les peuples du feu, du vent et de l’air pensent que le réveil des quatre-vingt-huit fauves est une bénédiction pour l’humanité. Selon eux, l’humanité, arrivée à un point de non-retour, doit être purifiée. Les monstres vont détruire cette civilisation et, sur les ruines de celle-ci, se formera un monde nouveau où vivront en paix humains et Kegaïnotami. Au contraire, les peuples de l’eau et de la terre sont persuadés que les quatre-vingt-huit fauves n’engendrent que destruction et misère. Selon eux, l’humanité doit continuer à vivre ainsi.

Cette divergence de croyances vient de l’envoûtement des quatre-vingt-huit fauves, il y a mille ans. Cette manipulation fait que les hommes du feu et du vent sont convaincus du bénéfice qu’apportera à l’humanité le réveil des quatre-vingt-huit fauves. Mais on peut penser que même sans cela, la même histoire aurait été possible. En effet, tout ce que Higa et Kaede (sous l’effet de l’envoûtement) reprochent à l’humanité est vrai dans une certaine mesure. Ils auraient donc pu agir de la même manière par eux-mêmes.

On retrouve ce même type d’opposition dans le fameux X de Clamp. Dans cette œuvre, les Dragons du Ciel et ceux de la Terre sont opposés, les uns désirant la destruction de ce monde pour en créer un nouveau, les autres souhaitant le préserver.

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